Les Pays-Bas restituent près de 500 objets pillés à l'époque coloniale, à l'Indonésie et au Sri Lanka, dont six pièces du Rijksmuseum.
Le gouvernement néerlandais a annoncé la restitution de 478 objets pillés durant l’époque coloniale, à l’Indonésie et au Sri Lanka. Ce sont les premiers objets que les Pays-Bas restituent à leurs anciennes colonies asiatiques.
« C’est un moment historique. C’est la première fois que nous suivons les recommandations pour restituer des objets qui n’auraient jamais dû être apportés aux Pays-Bas », a déclaré Gunay Usly, le secrétaire d’Etat néerlandais à la Culture et aux Médias. En 2020, un rapport du Conseil néerlandais pour la culture, rédigé par une commission présidée par Lilian Gonçalves-Ho Kang You, avocate spécialisée dans les droits de l’homme, exhortait le gouvernement à restituer « sans condition » les objets culturels pillés, si leurs pays d’origine le demandent.
Quatre statues de pierre de l’ancien royaume hindou javanais de Singhasari, un poignard keris du royaume de Klungkung (situé dans la province de Bali) et 132 objets d’art moderne de Bali –connus sous le nom de « collection Pita Maha » - ont été officiellement restitués au gouvernement indonésien, lors d’une cérémonie de remise des objets au Musée national d’Indonésie à Jakarta, au Musée national d’ethnologie de Leiden.
Cependant, la collection d’objets rapatrié en Indonésie ne comprendra pas les restes humains de « l’homme de Java », réclamés par le gouvernement indonésien en 2022. Découverts par le paléontologue néerlandais Eugène Dubois lors de fouilles en 1891 et 1892, les restes, dont un crâne, sont exposés au Naturalis Biodiversity Center de Leiden. « Rien n’a été refusé, mais certaines choses prennent plus de temps que d’autres », a précisé un porte-parole du gouvernement néerlandais au Guardian.
Parmi les objets à restituer, se trouve également le « trésor de Lombok » – une collection de centaines de pierres précieuses, d’objets en or et en argent, pillés par l’armée coloniale néerlandaise de l’île indonésienne de Lombok en 1894. Une partie du trésor a été restituée à l’Indonésie en 1977.
Six pièces de la collection du Rijksmuseum d’Amsterdam retournent au Sri Lanka, dont le Canon de Kandy, la pièce la plus importante. Ce canon a été pillé en 1765 par la Compagnie néerlandaise des Indes orientales, lors du siège et du pillage de la ville de Kandy, avant d’être offert à Guillaume V, prince d’Orange. Le canon est au Rijksmuseum depuis 1800. Les cinq autres objets qui seront restitués au Sri Lanka proviennent également de Kandy. Il s’agit de deux fusils (jingals), deux épées (kasthanes) et un poignard (pihiya).
« C’est une étape importante, mais ce n’est qu’une première étape », rappelle Gert-Jan Van den Bergh, spécialiste du droit de l’art dans le cabinet d’avocat Bergh Stoop & Sanders. Les 478 objets ne sont qu’une petite fraction d’objets coloniaux que possèdent les Pays-Bas. « Nous avons 300 000 objets coloniaux qui sont la propriété de l’Etat central rien qu’aux Pays-Bas », poursuit le spécialiste.
Cette initiative fait suite à un discours décisif prononcé en 2017 par le président français, Emmanuel Macron, qui a déclaré que le retour des objets africains était une « priorité absolue ». La France, l’Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas ont commencé à étudier les collections dans les musées ethnologiques et ont transféré de nombreux objets dans leur pays d’origine
Gert-Jan Van den Bergh suppose que la décision néerlandaise de restituer fera pression sur la Grande-Bretagne. « Le Royaume-Uni a encore beaucoup à faire en ce qui concernent la restitution de l’art colonial », a-t-il déclaré. « Les lois britanniques sur la restitution font de toute suggestion un tigre sans dents. Je suis convaincu que le Royaume-Uni ne veut pas aller de l’avant, car cela aurait de nombreuses conséquences, notamment en ce qui concernent les marbres du Parthénon. »
تعليقات